“Madame le directeur”, un spectacle à exploiter
La compagnie de théâtre d’entreprise A nous de jouer présentait son spectacle “Madame le Directeur” le 9 avril dernier à l’Embarcadère à Lyon.
Par Julie Devif, étudiante en psychologie
Résumé :
Le spectacle dure une cinquantaine de minutes et est organisé en saynètes. Une femme est sur le point de recevoir une promotion dans son entreprise « Love coach », spécialisée dans le coaching en séduction. Son boss lui propose le poste de DRH et pour ce faire, elle doit organiser une commission sur l’égalité professionnelle. Le spectacle met en scène son quotidien : de l’annonce de cette promotion à son mari, jusqu’à l’acceptation de la commission par deux de ses collègues, en passant par la vie de couple, de mère, d’employée. Sur le ton de l’humour, les acteurs reprennent les stéréotypes de sexe, les rapports hommes/femmes, jouent sur les représentations : du boss machiste à la féministe très engagée, parfois radicale.
La répartition des tâches ménagères, la féminisation des noms de métiers, la maternité, l’éducation, la conciliation vie professionnelle et privée, le plafond de verre, la socialisation différenciée (les couleurs, les compétences développées, les jouets…), la mixité, le congé paternité, l’essentialisation et le constructivisme, la répartition des métiers, le temps partiel chez les hommes, l’instinct maternel, la société patriarcale, les écarts de rémunération sont les thèmes traités à travers le projet de l’égalité professionnelle que la protagoniste essaie tant bien que mal de mener, tant auprès d’un responsable macho qui naturalise les sexes, que d’une collègue féministe qui s’emballe sur l’oppression de la domination masculine. Entre son quotidien de femme, de mère, d’épouse et de future DRH, le spectacle nous amène à nous questionner sur toutes ces thématiques, sur les difficultés d’être une femme dans notre société mais également, nous invite à remettre en question nos comportements et croyances.
Critiques :
J’ai beaucoup aimé le spectacle, et je dois avouer avoir bien ri, de par le caractère – parfois exagéré, amplifié (ou pas !) – des personnages. Cela fait écho à notre quotidien, et le jeu d’acteurs nous questionne sur nos pratiques, sur la difficulté d’aborder l’égalité, et toutes les représentations qui y sont liées. C’est une bonne mise en scène du réel, l’humour qui pourra – peut-être – s’avérer parfois incisif, ironique, sarcastique, permet une certaine prise de conscience. Je pense qu’un des avantages est que cela parle à tout le monde et que nous sommes face à un miroir.
Ce qui m’a moins convaincue :
La féministe trop radicale à certains moments (elle s’emporte vite, malgré son argumentaire très bien fait) qui pourrait conforter des personnes non averties dans leurs représentations du féminisme. Le mari conseille sa femme, et au final c’est sa solution qui marche (nous pouvons y voir ici l’homme qui apparaît comme plus expert des situations de travail, surtout vu le personnage !). Enfin, dans une des dernières saynètes, la féministe et le responsable machiste doivent danser ensemble, la féministe finit par se plier et se laisse mener par l’homme, ce qui est un peu dommage, on aurait préféré qu’ils arrivent à un consensus plutôt qu’à une subordination.
Un outil d’intervention :
Je pense que cela pourrait s’avérer un bon outil d’intervention. C’est une manière ludique d’aborder l’égalité professionnelle, mais pas seulement ! J’ajouterai qu’à ce spectacle, il faudrait y joindre un débriefing, je ne sais pas mais j’imaginais pendant la représentation que si, entre chaque saynète, on analysait et décryptait la scène, cela pourrait amener des débats très intéressants sur ce qui venait de se passer…