Un commentaire hostile a été posté samedi dernier sur notre blog, à la suite de notre billet de présentation de la rencontre autour d’Egalijouets qui aura lieu la semaine prochaine. Il mentionnait:

« Vous avez raison !! Castrons notre langue, notre société, notre culture !! Tout ira bien mieux après !!… Vivement l’extermination de tous les hommes !!… : on comprend mieux pourquoi l’emblème des Femen est une femme brandissant des couilles qu’elle vient de couper avec une faucille ! … » 

Nous souhaitons rappeler ici que ce blog a vocation à accueillir les pratiques, analyses, idées et discussions de personnes ayant pour but de développer une culture de l’égalité entre les filles et les garçons, entre les femmes et les hommes.

Cela signifie que notre projet vise à rendre dans les faits les êtres humains égaux entre eux – et non à envisager la supériorité d’une catégorie sur l’autre. Si cet internaute conclut que le but (ou l’effet) de la recherche de l’égalité est d’exterminer les hommes (le mot-clé étant la « castration » semble-t-il), nous souhaitons le rassurer immédiatement. Le but est qu’hommes et femmes puissent s’engager sur des trajectoires personnelles ou professionnelles différentes, ressemblantes ou identiques, mais avec les plus larges options possibles, sans que personne n’y ait à redire, c’est-à-dire entouré.e.s par une bienveillance sociale sur ce que peut et a envie de faire un être humain, quelle que soit son apparence et son appareil reproductif. Sans que personne ne pense ni ne décide à sa place. Ceci est valable autant pour un homme qui aimerait s’occuper de jeunes enfants ou d’esthétique que pour une femme qui souhaiterait travailler dans la maçonnerie, l’informatique ou la conduite de camions. Pour une femme qui déciderait de ne pas faire d’enfant et un homme de demander un temps partiel. Cela implique que nous encourageons garçons et filles à développer autant d’aptitudes, de compétences, de goûts que possible afin que chacun.e des jeunes et des adultes puisse avoir suffisamment de ressources personnelles et de confiance en soi pour faire et assumer de véritables choix de vie, le plus librement possible.

Nous comprenons et respectons que des personnes aient des avis différents. Sinon, notre action serait moins utile. Idéalement toutefois, il serait intéressant que ces avis soient éclairés et argumentés. Les savoirs en psychologie sociale sont très utiles pour cela. Il est possible que certains avis et réactions à notre propos ne le soient pas (très argumentés), parce que ce que nous remettons en cause touche à l’intime, à la construction de soi, à la façon dont nos parents nous ont élevé.e.s, à nos croyances. Tout ceci est très difficile à remuer. Nous pouvons nous sentir agressé.e.s par la proposition de remettre en cause les mobiles sur lesquels reposent nos choix de vie, notre système de valeurs. En 2011, nous avons tenu notre premier stand à une fête du livre dont le thème était « les filles et les garçons sont égaux, certains plus que d’autres. » Une partie des visiteurs et visiteuses est venue davantage pour la fête que pour le thème, mais est passée tout de même devant notre stand. Toutes les personnes avec lesquelles nous avons échangé se sont intéressées positivement à notre action, mais les réactions de deux personnes nous ont marqué.e.s. Une femme s’est effondrée en larmes devant nous parce qu’elle venait de comprendre que ses choix de vie avaient été conditionnés par le rôle qu’elle pensait devoir endosser en tant que femme. Un homme nous a agressé.e.s verbalement parce que nous remettions en cause l’ordre des choses (« son » ordre des choses, en fait, celui qu’il avait appris). Le sexe biologique (anatomique) et le sexe social (agir comme on l’attend d’un homme, agir comme on l’attend d’une femme) étaient à ce point confondus dans sa tête que nous lui donnions l’impression de modifier la nature, de créer une entreprise d’intervention chirurgicale visant à ce que les organes génitaux des humains soient les mêmes. Il comprenait que nous voulions créer des êtres identiques. A l’époque, nous avons fini par croire au bout d’une demi-heure d’argumentation qu’il était… comédien (!) et avons cherché – en vain – la caméra cachée… Maintenant nous savons à quel point les résistances sont profondes et intimes.

Ce type de commentaires sera donc supprimé à l’avenir même si nous en comprenons la logique. Cette expérience a toutefois le mérite de nous conforter dans le bien fondé de notre démarche et de nous montrer que nous allons dans le bon sens : celui du changement vers une société meilleure, qui privilégie les relations respectueuses et la tolérance vis-à-vis des choix de vie des personnes.

Pour finir, notre projet s’inscrit dans le respect des principes constitutionnels et des valeurs de notre république française : l’égalité des personnes (notamment dans l’accès aux savoirs et aux compétences, les possibilités de développement personnel, la considération…), la liberté individuelle (qui peut ainsi en découler, parce que les choix sont éclairés et les ressources personnelles suffisantes pour forger la confiance en soi) et la fraternité/solidarité qui sont pour nous indissociables.

Toutes les personnes qui souhaitent être associées à la signature de ce billet peuvent soit enregistrer un commentaire, soit nous faire parvenir un mail à contact[a]egaligone.org.

Karine Bertrand, enseignante – Sylvie B., enseignante – Anne L., cadre RH appui en management – Chloé Riban, étudiante en sociologie – Stéphanie Gosset, psychologue – Violaine Dutrop-Voutsinos, titulaire d’un M2R en Droits Humains à Lyon2, fondatrice d’EgaliGone – Florence Françon, animatrice pour enfants récemment diplômée dans le domaine de la promotion de l’égalité – Julie Devif, étudiante en première année de Master Psychologie Sociale et du Travail – Solenne Chassagne, libraire – Marion Ghibaudo, chargée de mission prévention – Loïc Bour, étudiant – Muriel Salle, maîtresse de conférences en histoire contemporaine, Université Claude Bernard Lyon 1, ESPE de Lyon – Géraldine GuillemotEmmanuelle Drouet, Formatrice – Alessandra FortinElise Vinet, MCF en psychologie sociale, Université Lyon2 – Laureline Carbucci, Psychologue Sociale – Cécile Boukabza – Christine Détrez, MCF à l’ENS de Lyon – Stéphanie Gaudillat, historienne et coordinatrice de l’UR-CIDFF Rhône Alpes – Karine C., informaticienne – Karine Bastide, enseignante – Anna Bonnin, professeure – Jörg FrankeI. GrangéStéphanie EynaudMarie Pachoud, étudiante agrégative en SES – Valérie Blanchard, enseignante –  Yannick Chevalier, MCF Langue française, Université Lyon 2 – Estelle Bonnet, Université Lyon 2, Centre Max Weber – Patrick Perrier, consultant-coach et professeur associé à l’INSA de Lyon – Eléonore Dumas, chargée de mission – Nina Charlier, professeure d’EPS, syndicaliste