Rétrospective « Déjà 10 ans » : 2011, la rencontre de nos premiers publics
Pour chaque année d’activité jusqu’à aujourd’hui, nous avons sélectionné un événement important pour l’association, une de nos réalisations ou productions particulière, et une intervention marquante. Et voici un zoom sur cette sélection 2011, témoignages et souvenirs à l’appui !
L’EVENEMENT 2011 : La fête du livre de Villeurbanne en avril.
Notre collectif était encore très petit, nous venions de créer notre page facebook. Et nous avons entendu parler de cette fête du livre, dont le thème de l’année était (quelle coïncidence !!) « Les filles et les garçons naissent égaux, certains plus que d’autres ». Appel de Gérard Picot, l’organisateur de toujours de cette grande rencontre villeurbannaise, qui nous donne un accord à trois semaines de l’événement ! Il nous faut réunir une équipe de bénévoles, créer nos premiers supports, les faire imprimer en papier recyclé et encre écologique – s’il vous plait – (nos deux fiches-outils les plus demandées aujourd’hui datent de cette période !) ou concevoir un diaporama (et emprunter un téléviseur pour le passer en continu), puis réaliser des affiches, des activités, et pourquoi pas créer quelques partenariats… Ce qui fut fait, car nous devions occuper un espace de 24m2 pendant deux jours !
« Je me souviens que notre stand avait eu son petit succès et que le public de l’événement avait été très réceptif à la démarche EgaliGone, toute récente à ce moment-là. » (Elise Chane)
« Hormis le succès du stand et les nombreux contacts noués ce jour-là, notamment avec une enseignante pour laquelle nous avons animé notre premier débat quelques semaines plus tard, trois souvenirs ont été marquants pour moi : l’élan de solidarité de mon entourage personnel et professionnel pour tenir le stand (nous étions une dizaine de personnes très motivées), un monsieur très en colère à la vue de notre projet et qui nous a quasiment insulté·e·s (tellement que j’ai cru à une caméra cachée !) et enfin une dame qui a été bouleversée par notre stand et qui est revenue plusieurs fois (elle n’avait pas choisi sa vie, embarquée dans un rôle mi-domestique mi-maternel qui ne l’avait pas rendu heureuse…). » (Violaine Dutrop)
LA PRODUCTION 2011 : L’enquête animation jeunesse réalisée à Bron (et présentée à la MJC de Bron en septembre)
Nous avions décidé de nous nommer Institut pour contribuer à relayer et à produire des savoirs utiles à la lutte contre les discriminations. Dans cette perspective, nous avons donc commencé par contacter le département de psychologie sociale de l’Université Lyon 2 pour échanger sur notre projet associatif et recruter deux étudiant·e·s en stage pour réaliser une enquête sur le territoire de Bron. Ce travail visait à faire émerger le regard éventuellement différencié que portaient des professionnel·le·s de l’enfance sur les filles et les garçons. Le rapport d’enquête se trouve en ligne. Il a été documenté par Elise Chane et Stéphanie Gosset, qui ont réalisé ce travail sous la direction de l’enseignante-chercheuse Elise Vinet (qui devint alors une de nos partenaires-soutiens fidèle et enthousiaste !), puis rédigé par Chloé Riban, supervisée par Violaine Dutrop.
Les trois témoignages (Elise Chane et Stéphanie Gosset, mais aussi Christelle Font qui a été interviewée) révèlent combien une démarche associative peut devenir professionnalisante ou marquer les esprits.
« Je me souviens que c’était un travail important pour moi à l’époque, et que nous n’étions pas trop de deux pour mener cette enquête. La présentation s’était bien passée aussi. C’était la première fois que je présentais un travail universitaire à du grand public. » (Elise Chane)
« Cet homme dont nous avons exclu l’entretien du corpus, parce que quand il parlait des filles, c’était toujours d’une seule et même. Il m’a tenu la porte alors qu’elle s’ouvrait non pas vers nous, mais vers l’avant. (…) Il voulait absolument être galant, mais ce n’était pas approprié comme situation (…). Ensuite, il a eu besoin de fumer à plusieurs reprises pendant l’entretien, ce qui était extrêmement compliqué pour moi.
Ce souvenir (…) m’a appris que c’est à moi de donner le cadre. Je voulais me montrer souple envers l’interviewé par gratitude envers le fait qu’il acceptait de donner de son temps. Mais en vérité, je trouvais la situation gênante : le format de l’entretien ne peut pas différer à ce point en fonction des personnes interviewées. Ces temps où il allait fumer étaient des temps où il prenait de la distance par rapport à l’entretien, temps que les autres personnes n’avaient pas pris. Parfois, il vaut mieux prendre le risque que la personne refuse les règles du jeu (et donc ne joue pas) que de prendre le risque de perdre son temps. Cet épisode m’a aussi permis de comprendre l’effet de désirabilité sociale puisque celle-ci s’est manifestée de façon gênante, au point de ne pas pouvoir exploiter l’entretien. Bien que désagréable, cet épisode a été riche en enseignement sur ma position de chercheuse. » (Stéphanie Gosset)
Ce que représente EgaliGone, pour elles aujourd’hui (ou à l’époque) :
« EgaliGone représentait pour moi une manière professionnelle, malgré le statut associatif, de travailler à plus d’égalité à travers l’éducation des enfants. Cette association représente aussi un espace accueillant et de rencontre sur ces problématiques. EgaliGone a été la première structure où j’ai vraiment pu prendre conscience de l’intérêt de ma discipline universitaire (psychologie sociale) et de prendre confiance concernant sa pertinence dans le monde actuel. » (Elise Chane)
« EgaliGone était et reste, selon moi, une belle association qui permet d’œuvrer à la construction de représentations plus égalitaires auprès des enfants. » (Stéphanie Gosset)
« Une association qui éveille l’esprit critique des enfants et des éducateurs.trices (parents, animateurs.trices, enseignant.e.s, tous les adultes intervenant dans la vie de l’enfant) sur les stéréotypes genrés véhiculés chez nos jeunes futures citoyen.ne.s et parents afin de créer une société plus égalitaire. » (Cristelle Font)
Ce que cet épisode ou ce qu’EgaliGone a eu comme incidence éventuelle sur elles :
« EgaliGone m’a donné un coup de pouce pour mon recrutement à l’INSA après mon service civique. J’ai beaucoup appris sur l’action de terrain et la pratique avec les différents événements auxquels j’ai participé ou bien que j’ai contribué à organiser ou bien sur la question des livrables. J’ai également beaucoup appris sur le fonctionnement associatif et cela m’a donné l’assurance nécessaire de monter ma propre association le moment venu. » (Elise Chane)
« À l’époque, j’étais très proche d’EgaliGone puisque j’avais participé à la toute première recherche menée par l’Institut. J’étais chercheuse, et j’apprenais à penser les inégalités de genre. Grâce à EgaliGone, j’ai compris comment passer de la pensée à l’action à travers le militantisme féministe, ce qui m’a profondément marquée.
Mon passage à EgaliGone a aussi été l’occasion d’une grande stimulation intellectuelle pour moi. » (Stéphanie Gosset)
« Une attention particulière à mon discours et au discours de mes collaborateurs.trice auprès des enfants et des animateurs.trices du Centre Aéré, l’utilisation de la féminisation des noms (métier) et de l’écriture inclusive et leur défense auprès des septiques, un combat permanent par le discours contre l’utilisation de mots ou blagues sexistes. L’importance du chemin encore à parcourir, il ne faut pas lâcher… les petits cailloux font les grandes montagnes. » (Cristelle Font)
L’INTERVENTION 2011 : Une animation-débat au Théâtre de la Renaissance, à Oullins, après une création théâtrale lycéenne, dirigée par Le Lien Théâtre
La première intervention d’EgaliGone a été très marquante, bien sûr. Une enseignante du lycée professionnel Jacquard à Oullins nous avait fait part, à la fête du livre de Villeurbanne, de son besoin : l’animation très prochaine d’un échange avec un public d’élèves de collège (et des membres de l’équipe éducative présente) au Théâtre de la Renaissance, suite à une représentation créée par ses élèves sous la direction du Lien Théâtre. Le propos traitait des représentations du genre et du sexisme, le tout vu par ses élèves. La professeure de français avait convié des classes de collège pour l’occasion. Violaine s’est lancée dans cette première aventure : présence à la répétition générale et rencontre d’Anne-Pascale Paris du Lien Théâtre, lectures et collecte de données sur tous les sujets traités par les élèves, préparation d’un déroulé de questionnement pour relancer la prise de parole… et c’était parti.
« Mes souvenirs… ? Une superbe rencontre professionnelle et humaine avec Anne-Pascale Paris d’abord, un échange passionnant avec des élèves – et des professeur·e·s – très intéressé·e·s par les thèmes abordés, notamment la mauvaise répartition des tâches domestiques (qui causent des séparations dans les couples !), des lycéennes qui se sont engagées dans cette action, un grand débat sur la place et le rôle des hommes pour parvenir à l’égalité des sexes, une graine qui germera ensuite sur l’usage du théâtre pour éduquer à l’égalité… Et puis une rencontre imprévue dans les rues de Lyon, quelques années plus tard, avec notre interlocutrice du théâtre de la Renaissance, qui m’a confié dans la discussion avoir décidé, suite à cet événement-déclencheur, de reprendre ses études en s’inscrivant au Master EGALES, créé récemment à l’Université Lyon 2 ! Que de bonnes ondes, donc… » (Violaine Dutrop)