photo Candice Barret

Candice Barret s’est lancée dans la sensibilisation des éducateurs et éducatrices aux questions de genre et connaît très bien l’univers des enfants et de l’animation en éducation populaire. Entre autres engagements, elle a été il y a quelques années membre d’EgaliGone. Nous relayons certaines demandes d’interventions vers elle, voici pourquoi.


Pourquoi as-tu décidé de sensibiliser les publics éducatifs et les enfants à l’égalité des sexes ?

Très tôt dans mon cursus universitaire, quand j’ai commencé à m’interroger et à me pencher plus sérieusement sur les discriminations liées au genre, je me suis rendue compte que pour changer les mentalités afin d’aller vers des rapports femmes-hommes plus équilibrés et plus respectueux, il fallait « prendre le mal à la racine » et commencer dès le plus jeune âge à repenser ces enjeux. La clé, pour moi, c’était l’éducation, plus on commencerait tôt, mieux ce serait car « mieux vaut prévenir que guérir ». Informer, sensibiliser, questionner, et échanger avec les enfants et les jeunes des stéréotypes sexistes et des rôles prédéfinis auxquels ils nous assignent est pour moi une évidence. Il faut discuter et déconstruire pour prendre conscience des conséquences des stéréotypes, pour les désamorcer, pour ne pas les reproduire et pouvoir, in fine, prévenir et réduire les violences sexuelles et sexistes et, surtout, à encourager l’épanouissement des enfants dans leurs personnalités, leurs parcours et leurs goûts. Promouvoir une éducation non sexiste, égalitaire et éclairée est à mon sens une excellente façon d’outiller les enfants et les jeunes à être à l’écoute de leurs envies et leurs besoins, sans se sentir empêché.es par les injonctions. Se pencher sur l’égalité des genres à travers l’éducation c’est finalement remettre aussi les enfants et les jeunes au cœur du processus, pour construire ensemble une société plus juste.

 Je sensibilise à travers des ateliers, et je forme et accompagne les pro de l’éducation et les parents pour qu’ils et elles puissent prendre part à cette dynamique et mettent en œuvre une culture de l’égalité. Tous ces adultes sont au plus près des différents publics et jouent un rôle important à travers leurs pratiques et ce qu’ils et elles transmettent : il me semble donc aussi pertinent de les accompagner afin de monter en compétences professionnelles sur cette thématique.

Quel est ton parcours ?

J’ai serpenté dans les sciences humaines, une fois mon bac littéraire en poche, j’ai intégré une prépa lettres, puis une licence en histoire-géographie avant de terminer avec un master de sociologie en études de genre. Très vite, j’ai compris que c’était vraiment la question de l’éducation, du « comment éduquer à l’égalité ? » qui m’intéressait. J’ai eu la chance de partir étudier en Finlande et, outre les aurores boréales, les saunas et les lacs gelés, j’étais vraiment curieuse de voir quelles approches éducatives étaient proposées dans ce pays considéré comme à la pointe sur le sujet. J’ai ensuite travaillé dans un média sur la parentalité où j’ai eu accès à beaucoup de livres de littérature jeunesse, ce qui m’a permis d’aiguiser mon regard sur les représentations et les stéréotypes que ces albums mettent encore bien trop souvent en avant… Après ça, j’en ai eu assez de la théorie, j’ai voulu travailler sur le terrain afin de me confronter à des publics variés (enfants et jeunes de tout âge) et de m’épanouir au contact de différent.es professionnel.les de l’éducation.  J’ai travaillé à la MJC de la Duchère (Lyon 9) où j’ai été animatrice auprès des adolescent.es, et directrice adjointe du périscolaire dans une école maternelle. Ce fut une expérience très riche qui m’a permis d’observer, avec mon regard de sociologue, ce qui se jouait dans les rapports entre les filles et les garçons, comment ils et elles se comportaient ensemble, et comment, en parallèle les professionnel.les interagissaient avec ces publics : quelles attentes différenciées on pouvait (inconsciemment) avoir, quel vocabulaire était employé, etc.  Tout ce que se jouait dans l’anodin du quotidien pouvait impliquer des stéréotypes, et c’est sur cet aspect insidieux du genre que j’ai eu envie de travailler : comment repérer les stéréotypes pour ne pas les reproduire et comment décortiquer leurs mécanismes, le sexisme et les discriminations qui en découlent.  J’ai franchi le cap l’année dernière, bien décidée à planter des graines et à continuer d’insuffler une réflexion sur l’égalité dans le domaine de l’éducation. C’est ainsi que je me suis lancée à mon compte et que j’ai créé La Puce à l’oreille.

Sur quoi t’appuies-tu dans tes interventions ? Quels savoirs, quelles méthodes ?

Je m’appuie sur des recherches, des études, des chiffres issus du monde universitaire, de travaux menés par des chercheurs et des chercheuses sur la question, je mélange bien le tout et j’ajoute à cela mon expérience dans le domaine socio-éducatif pour créer des modules qui s’inspirent d’une expérience de terrain et qui articulent savoirs théoriques et réalité des missions des professionnel.les. Il me tient à coeur de rentre visibles et accessibles les travaux des sociologues – mais aussi des neurologues, des historien·nes, des associations, etc. – sur la question du genre grâce à une approche horizontale, ludique et interactive pour que les participant.es puissent s’en emparer et les appliquer dans leur travail de tous les jours. Qu’il s’agissent de publics pro ou de jeunes, l’objectif étant aussi de créer dans le groupe des conditions pour réfléchir et agir ensemble, en veillant à que chacun.e se sente libre de prendre la parole et de s’exprimer.

Peux-tu nous parler d’une intervention que tu as menée auprès d’adultes et d’une autre menée auprès d’enfants ?

J’ai formé une équipe qui travaillait dans une crèche. C’était intéressant de pouvoir proposer un temps spécifique pour aborder cette thématique pour que, tout d’abord, elles puissent échanger dessus, être en désaccord aussi parfois mais d’avoir cet espace pour en parler, et trouver collectivement un fil rouge à suivre afin de l’inscrire dans les valeurs éducatives et pédagogiques de l’établissement. Cela permet d’impulser une culture de l’égalité de façon plus pérenne. J’ai beaucoup aimé cette formation car, au début, plusieurs étaient réticentes à cette thématique, ne sachant pas trop où j’allais les emmener. Mais lorsque que l’on recontextualisé ensemble avec la réalité de leurs missions et que l’on a explicité que l’égalité était avant tout permettre à chaque enfant de grandir sereinement, en accord avec sa singularité et de permettre à chacun.e de prétendre à tous les possibles, alors on s’est rendu compte que l’on était sur la même longueur d’onde.

Avec les enfants, ce que j’aime bien c’est leur spontanéité et de pouvoir aborder la thématique des stéréotypes de l’égalité filles-garçons avec des supports pédagogiques chouettes. J’utilise notamment la littérature jeunesse avec des histoires finement sélectionnées qui n’hésitent pas à envoyer valdinguer les princesses un peu trop passives, à proposer un panel large et diversifié de personnages loufoques et audacieux qui sortent des sentiers battus et des archétypes poussiéreux. On fait des quiz, des débats, des créations artistiques pour pointer du doigts des injustices liés aux stéréotypes… Tout est possible tant que les ateliers sont pensés pour les enfants avec des mots adaptés et choisis en fonction de leur âge. Je me souviens d’une petite fille qui avait appris lors d’un atelier que l’on pouvait dire « super héroïne », que le mot existait. Cela a débloqué quelque chose, elle était tellement heureuse à l’idée que ce ne soit pas quelque chose réservé aux garçons… Il y a souvent des choses qui se passent, des pas de côté qui me font dire que sensibiliser dès le plus jeune âge ça permet vraiment de planter des graines qui vont faire leur chemin et finir par pousser pour donner quelque chose de grand !

 Comment te contacter ? Où peut-on connaître l’étendue de ce que tu proposes ?

N’hésitez pas à me contacter par email à candicelapalo(at)gmail.com, si vous avez un projet particulier et que vous souhaitez que l’on collabore ensemble. Je peux aussi vous envoyer ma plaquette ! Retrouvez-moi également sur Linkedin (Candice Barret) ou sur mon compte pro Instagram : lapucealoreille_